À travers le monde, les gouvernements sont sous pression depuis plusieurs mois pour agir contre la pandémie et trouver des solutions afin d’éviter, avec le déconfinement progressif, une potentielle « deuxième vague ». L’une de ces solutions repose sur l’introduction d’applications pour smartphones, dites « de traçage de proximité » dont la nature et le mode d’implémentation varient selon les contextes nationaux. En Suisse, l’application SwissCovid est disponible au téléchargement depuis le 25 juin 2020. Plus ou moins transparents, intrusifs et fiables, ces dispositifs de traçage soulèvent des enjeux de confiance, de transparence, de protection des données et de réversibilité qui sont le plus souvent discutés d’un point de vue technique et juridique. Ici, nous proposons plutôt de les appréhender sous l’angle du projet politique qu’ils charrient ; pour ce faire, il nous faut prendre au sérieux les notions mêmes de dispositif et de traçage.
Une gouvernance à distance
Si l’on suit le philosophe Giorgio Agamben, les dispositifs ont par définition la capacité de capturer, d’orienter, de déterminer, d’intercepter, de modeler les gestes, les conduites, les opinions et les discours des êtres vivants. Comme son nom l’indique, un dispositif (dispositio) « dis-pose » l’être humain, dans un geste continu qui œuvre tout à la fois dans le sens juridique de l’agencement de droits et de devoirs, le sens technologique de la machine qui « fait marcher » et le sens militaire de la « planification stratégique »[1]. Le geste tout à la fois juridique, technologique et militaire qu’accomplissent les dispositifs de traçage est un appel individualisant à la compliance et à la responsabilité citoyenne. Ainsi les autorités suisses répètent-elles à l’envi que l’application ne peut être efficace que si elle emporte « l’adhésion maximale » de la population. Sommé de contribuer à la prévention sanitaire et à la conjuration des risques, tout un chacun fait l’objet d’une interpellation décisive, éminemment morale : celle de l’injonction de téléchargement et d’utilisation de l’application. « We need you », voilà en substance le message du gouvernement suisse. Mais une telle interpellation ne tient pas tout seule ; elle est soutenue par un grand récit, celui de la sécurité, de la quête inlassable et forcément inachevée de « communautés plus sûres ». Or, ce grand récit sous-tend aussi bien les discours sanitaires employés dans le domaine de la prévention de la maladie que les discours politiques activés dans celui de la prévention du crime. Afin de mieux nous « protéger », il nous faut agir de façon toujours plus précoce, sur la base de conjectures et au moyen de technologies de surveillance à distance – quitte à considérer tout un chacun comme un potentiel criminel… ou porteur de virus.
L’homo eligens à l’ère de la « dataveillance »
La notion de traçage renvoie à l’univers de la surveillance, qui peut être définie comme une attention ciblée, routinière et systématique, à des informations à caractère personnel à des fins de régulation, de contrôle de gestion de décision et/ou de protection[2]. À l’ère du numérique, cette attention est toujours plus générale, généralisée et automatisée ; surtout, elle n’est plus uniquement l’apanage des entités étatiques. Le recueil massif de nos données est devenu une pratique omniprésente, mise en œuvre par une multitude d’acteurs publics et privés, humains et non-humains, qui déclinent chacun à sa manière la « dataveillance » et sa vocation principale : influer sur nos comportements.
Dans le domaine de la sécurité étatique et de la prévention de la déviance (criminalisée), la dataveillance est régulièrement opérationnalisée par la notion de risque ; ce risque est présumé calculable, notamment par le biais de corrélations statistiques, éludant ainsi les études classiques sur les ressorts sociaux de la « criminalité ». Le calcul du risque obéit en particulier à une logique probabiliste qui ventile les populations en différentes catégories dites, précisément, « à risque » de poser problème. Les technologies chargées de contrôler ces populations, par exemple les bracelets ou les puces électroniques, ont deux caractéristiques principales. D’une part, elles échappent en grande partie au jugement et au débat public car elles se présentent comme des outils techniques neutres et objectifs, censés pallier l’arbitraire des subjectivités. D’autre part, elles ciblent les individus, leurs comportements et leurs dispositions psychologiques et non pas des difficultés sociales ou des problèmes structurels.
Ces deux caractéristiques se retrouvent dans les dispositifs mi-étatiques, mi-privés, de traçage sanitaire, qui visent eux aussi à instaurer des « communautés plus sûres ». Le solutionnisme technologique dont ces dispositifs témoignent est tellement puissant qu’il en devient même imperméable à l’épreuve des faits[3]. Nombre de gouvernements, dont le gouvernement suisse, s’obstinent en effet dans cette voie alors même que les résultats obtenus dans d’autres pays sont plus que médiocres. En Australie, l’application a été téléchargée plus de 6 millions de fois et n’a permis d’identifier qu’un seul cas en un mois ! Quant à l’interruption de la chaîne de contamination, elle est bel et bien présentée comme une affaire de responsabilité individuelle et de choix moral. Celle ou celui qui n’obtempère pas s’expose à se voir reprocher de privilégier égoïstement sa liberté au détriment de la sécurité de tous : « Tu n’es pas une île, il suffirait que ta mère ou ton enfant soit touché et tu raisonnerais différemment ». La moralité se trouvant du côté de la docilité numérique, l’immoralité est nécessairement du côté des récalcitrants, ce qui explique la logique en deux temps qui anime nombre de ces dispositifs. Une telle logique consiste, dans un premier temps, à surresponsabiliser l’individu, rajoutant à la « to do list » déjà fort longue du parfait citoyen, diligent et coopératif, une charge mentale supplémentaire : celle d’être constamment en veille, armé de sa vigilance et de son application. Au cœur du dispositif de traçage se loge ainsi la figure à la fois vertueuse et anxieuse de l’Homo eligens dont parle Zygmunt Bauman, cet « acteur qui choisit » rationnellement de prendre ses responsabilités, fût-ce en limitant sa liberté : le coût de cette limitation lui paraît en effet bien dérisoire par rapport au gain de sécurité dont il serait le bénéficiaire[4]. Mais le dispositif, en transformant un enjeu collectif en une myriade de décisions individuelles, se heurte nécessairement à un problème, celui de la défaillance potentielle des vigiles eligens qui sont à son principe. Dans un deuxième temps, le dispositif doit donc composer avec l’individu, idiot ou récalcitrant, qui ne mérite pas la responsabilité qu’il lui a lui-même confiée ; il doit s’en méfier car il y a un être de mauvaise volonté, sinon un déviant ou un outsider, qui sommeille en lui et qu’il lui faut contenir. C’est bien de cette méfiance viscérale dont témoignent les deux solutions que certaines provinces en Italie envisagent pour accélérer l’adoption de leur application de traçage Immuni : l’une consisterait à limiter les déplacements des personnes n’ayant pas téléchargé l’application, l’autre à rendre obligatoire le port des bracelets électroniques pour les personnes âgées, peu familières des applications mobiles et pourtant plus exposées aux risques de la Covid-19.
Une vision atomisée et a-sociale du monde social
Elaboré selon une logique strictement individualiste, le dispositif de traçage prétend adopter la perspective du virus – une perspective qui ne s’intéresserait pas à notre âge, à notre sexe, à notre nationalité ou à nos préférences mais à nos corps et à leur fonction de véhicules biologiques. Pour le virus, l’humanité entière se partagerait seulement en trois groupes : « les Susceptibles, c’est-à-dire tous ceux qu’il pourrait encore contaminer ; les Infectés, c’est-à-dire ceux qu’il a déjà contaminés ; et les Rejetés, ceux qu’il ne peut plus contaminer »[5].
À l’encontre de cette vision, l’on pourrait rétorquer que le virus opère bel et bien une forme de discrimination biologique, notamment en termes d’âge et, semble-t-il, de poids et de genre puisque le profil de ses victimes de prédilection sont des hommes plutôt âgés et en surpoids[6]. À cette discrimination de nature biologique s’en rajoute une autre, de nature sociale, qui rend certain-e-s plus « susceptibles » que d’autres d’être contaminé-e-s, notamment les métiers de soin et de service (santé, police, vente, transports, nettoyage, abattoir) qui ont perduré durant le confinement. Or, pour saisir la manière dont la discrimination sociale interfère avec la biologie, il faut quitter la science épidémiologique des nombres et des purs points de contact pour adopter une réflexion en termes d’écologie politique et de formes de vie. C’est en renonçant à réfléchir exclusivement en termes d’abstractions épidémiologiques, de vecteurs et de connections, que l’on peut saisir les enjeux relationnels, sociaux et politiques, dans lesquels sont différentiellement empêtrés les Susceptibles. Seule une perspective d’écologie politique permet, en effet, de comprendre la raison de l’échec de la mise en place du dispositif Tracetogether à Singapour – en l’occurrence, le fait qu’un nouveau foyer de contagion s’est déclenché parmi des immigrés qui n’ont ni les moyens d’avoir un smartphone, ni de se faire tester, ni de se faire soigner, et encore moins de se mettre en quarantaine pendant 15 jours[7]. Ce qu’un tel échec manifeste n’est pas que les immigrés sont de mauvais coopérateurs, mais que ces dispositifs souffrent d’un mal viscéral : leur aveuglement social.
Pour comprendre la portée de cet aveuglement social, il suffit de mettre un peu de chair sociale au squelette numérique que constitue un dispositif de traçage. Imaginons une Susceptible qui doit prendre tous les matins un train bondé pour se rendre à son travail.

Si la Susceptible dispose – ce qui est loin d’être garanti – d’un smartphone suffisamment récent et efficient pour lui permettre de télécharger l’application, elle reste dans l’impossibilité de respecter la distanciation physique. Même si elle porte un masque, elle risque alors de recevoir une série de notifications et d’alertes tout au long de sa journée, déjà éreintante. « On compte sur vous », « vous êtes en danger », « vous risquez de contaminer les autres », lui dit en substance l’alerte. Que la Susceptible doit-elle faire pour bien faire ? Se faire tester à chaque fois ? Se mettre en quarantaine et risquer de perdre son travail ? Quelle position intenable ces interpellations sanitaires lui imposent-elles donc ?
On le voit, tous les Susceptibles ne sont pas égaux face aux dispositifs de « proximity tracing ». Ces derniers encapsulent une certaine vision des sujets qui sont destinés à en être les « suppôts » : l’homo eligens, l’individu « optant » qu’ils configurent, est plutôt un cadre de classe moyenne qui possède un smartphone de dernière génération, qui voit peu de monde durant la journée, va boire un verre après le travail et peut se mettre en télétravail s’il reçoit une alerte. Il a les moyens d’agir de manière « solidaire » alors que d’autres, devenus du coup immoraux, en sont dépourvus, ce qui montre l’angle mort de ce type de dispositifs : le pouvoir d’agir, en l’occurrence celui de « protéger les autres », dépend moins de dispositions psychologique (égoïste, altruiste, etc.) ou d’inclinations morales (se sacrifier ou non pour le bien commun) que d’un équipement politique qui le soutient, l’amplifie ou au contraire, l’entrave. C’est l’importance de ces équipements que souligne à juste titre le concept de « capabilities » et d’« encapacitation »[8]: loin d’être hors sol, le pouvoir d’action est le résultat d’un couplage entre des dispositions individuelles et des dispositifs techniques et sociaux. Alors que certains de ces dispositifs ont pour vocation de briser toute capacité d’agir, tels les dispositifs d’enfermement carcéral pour des délits mineurs, d’autres, tels les dispositifs numériques de soutien à la dyslexie, équipent et prolongent l’agency de leurs bénéficiaires. Imposés ou proposés à des Susceptibles trop vulnérables pour pouvoir assumer la charge qui pèse sur leurs épaules, les dispositifs de traçage ne sont aucunement « encapacitants ». Car le geste tout à la fois juridique, technologique et militaire qu’ils accomplissent est individualisant et désocialisant ; il extrait ou arrache les Susceptibles de leur forme de vie pour les concevoir comme des simples noeuds de contamination. Un tel geste est aussi fondamentalement dépolitisant.
Un outil de diversion politique
La mise en place des dispositifs de traçage, malgré la démonstration de leur inefficacité dans d’autres pays, suggère qu’elle remplit d’abord une fonction symbolique : celle de montrer que le gouvernement accompagne le déconfinement par des « mesures efficaces ». Elle donne également au citoyen le sentiment qu’il garde le contrôle de son destin sanitaire. Enfin et surtout, la mise en place de ce type de dispositif dépolitise la question sanitaire : elle délègue aux individus le soin et le fardeau d’interrompre la chaîne de transmission. Au prisme des applications de traçage, la solution à la pandémie est technique, individuelle et « user-friendly » – confirmant ici encore le « solutionnisme technologique » qui hante les décisions gouvernementales. Or, c’est précisément cet imaginaire individualiste et techniciste, la politique ou plutôt l’absence de politique de santé publique et les déséquilibres écologiques qui ont contribué au désastre sanitaire. Autrement dit, le dispositif fait diversion, occultant le rôle décisif que l’impréparation des politiques publiques – des politiques de moins en moins publiques et de plus en plus orientées vers une diminution du coût de la santé – a joué dans la crise sanitaire de nombreux pays.
Cette impréparation n’est pas conjoncturelle ou accidentelle, elle est structurelle : les mauvaises conditions de travail des professionnels de la santé, l’absence de masques et de matériel de protection ou le manque de tests sont le symptôme d’une économie néo-libérale et court-termiste qui oriente les (non-)investissements publics. En Italie, si la Lombardie, région pourtant réputée aisée et éduquée, a été la plus touchée, ce n’est pas parce que ses habitants sont particulièrement peu attentifs ou « careless »; c’est parce qu’ils habitent dans une province gouvernée par l’extrême droite, qui a procédé à une politique massive de réduction des subventions aux hôpitaux et abandonné les unités de soins intensifs aux mains d’acteurs privés à hauteur de 30%, ce qui a forcé le gouvernement lombard à négocier avec eux « à un moment où le facteur temps était déterminant »[9]. Dans un tel contexte, il n’est pas étonnant que la réponse italienne soit si virulente quant à l’implantation de l’application de traçage Immuni ; les outils numériques se voient délégués la résolution de la crise sanitaire que le gouvernement refuse de traiter comme un problème politique.
Le débat virulent, essentiellement technique et juridique, sur l’opportunité des dispositifs de traçage remplace ainsi l’enquête politique que constitue la « grande éthique », l’éthique « élargie » de nos choix de société et de « nos modes de vie » par la « petite éthique » des droits individuels et du consentement interpersonnel, le plus souvent vicié ou aveugle[10]. En accaparant l’attention publique, cette éthique restreinte a une conséquence non négligeable : elle fait basculer hors cadre les questionnements collectifs qui relèvent, eux, de la grande éthique. C’est pourtant bien une éthique élargie du care, adossée à une enquête politique sur la hiérarchisation des priorités publiques – à commencer par la revalorisation sociale et salariale des professions de « première nécessité » –, qu’il conviendrait de mener actuellement. Ce n’est pas la moindre des ironies que le terme CARE ait été détourné en France en un acronyme, celui du « Comité analyse, recherche et expertise » chargé de conseiller les autorités dans leur stratégie de « lutte contre le Covid-19 ». Le CARE a pour mission d’« accompagner la réflexion » non seulement en matière de traitements et de tests, mais aussi sur « l’opportunité de la mise en place d’une stratégie numérique d’identification des personnes ayant été au contact de personnes infectées »[11]. Au lieu de soumettre au débat public les jalons d’une véritable politique du soin, on nous prépare un petit kit de contrôle, un prêt à porter de dataveillance que le citoyen appliqué, promu vigile sanitaire, doit activer, conspirant ainsi à sa propre surveillance.
Cette petite faiblesse qui nous perdra
En 2013, l’entreprise de biscuits Mikado changeait son slogan célébrissime de « la petite faiblesse qui vous perdra » pour un gimmick en anglais « Even if you shouldn’t ». Transposé à la dataveillance dans une société rivée sur la gestion des risques, ce glissement de moto de Mikado fait écho à la normalisation de l’objet qui nous occupe. Au motif de mieux nous protéger, nous sommes prêts, « même si nous ne devrions pas », à nous plier à des technologies qui nous pilotent à distance. Le problème est que cet appareillage, largement invisible et semi-clandestin, esquive le regard public et échappe à l’épreuve démocratique par excellence que constitue l’épreuve de publicité, au double sens de mise en visibilité et d’ouverture au jugement.
Plusieurs pays, y compris l’Italie et le Lichtenstein, préparent ainsi la mise en place de bracelets électroniques, réservés jusqu’à présent à des populations judiciarisées : l’on est prêt à l’incarcération de soi ou des autres pour se protéger. Cette course aux armes préventives est d’autant plus alarmante que les États cèdent à l’appel d’entreprises privées, telles Apple et Google, qui détiennent une technologie dont ils estiment avoir besoin mais qu’ils ne maîtrisent pas suffisamment pour pouvoir protéger leur population de ses dérives potentielles[12]. Une telle course, effectuée dans l’urgence, est d’autant plus inquiétante qu’elle pourrait engendrer l’« effet cliquet » que craignent nombre de spécialistes du numérique, à savoir un impossible retour en arrière technologique[13].
C’est dire si la peur est bien mauvaise conseillère. En effet, les tendances à l’action induites par la peur, à savoir la sidération, la fuite ou la lutte (freeze, fight or flight), sont fort peu compatibles avec l’idéal de la discussion critique qui est censé animer les sociétés démocratiques. Interpellés en tant que victimes potentielles, les citoyens peuvent difficilement prendre la position du « spectateur » au-dessus de la mêlée et doté de sa pleine faculté de juger. La peur tend à annihiler la distance qui permet la participation réfléchie au débat pluraliste sur ce que nous voulons faire et sur ce que nous voulons devenir ; seul le résultat compte, en l’occurrence l’éloignement de la menace. Pris dans une logique de risque et de menace, le citoyen doit choisir son camp et se préparer à obéir.
Bien entendu, cette obéissance est loin d’être garantie, comme le montre le nombre encore restreint des personnes qui ont « embarqué » SwissCovid[14]. Mais cela ne veut pas dire que l’horizon des actions que dessine ce type de dispositif est inopérant. En reportant les risques à l’échelle individuelle des « homo eligens », il détourne l’attention des risques communs que nous devrions adresser collectivement et publiquement. Pour initier un tel débat, la logique épidémiologique des réseaux, des chaînes et des probabilités de contamination ne suffit pas ; elle doit être impérativement complétée par la logique systémique des interdépendances biologiques et sociales et par leur problématisation politique. Une telle problématisation est d’autant plus essentielle que, pour contrer la cascade de maux sociaux et sanitaires que de nouvelles épidémies, encore amplifiées par les désastres écologiques, pourraient engendrer, les dispositifs de traçage paraissent bien dérisoires[15].
Laurence Kaufmann, sociologue, et Manon Jendly, criminologue Université de Lausanne
[1] Agamben G. (2006), « Théorie des dispositifs », Po&sie, 1(115), pp.25-33.
[2] Lyon D. (2018). The Culture of Surveillance. Watching as a Way of Life. New Jersey: Wiley.
[3] Sur les conséquences, en lien avec l’école à la maison, du solutionnisme technologique, cf. le billet de Daniela Cerqui sur ce blog.
[4] Bauman Z. (2006). La vie liquide. Arles : Editions du Rouergue.
[5] P. Giordano, « Je ne veux pas passer à côté de ce que l’épidémie nous dévoile de nous-mêmes », Le Monde, 24 mars 2020.
[6] Office fédéral de la santé publique, Maladie à coronavirus 2019 (COVID-19). Rapport sur la situation épidémiologique en Suisse et dans la Principauté de Liechtenstein. Etat au 23.06.2020.
[7] B. Philip, « À Singapour, l’épidémie de Covid-19 révèle la précarité des travailleurs migrants », Le Monde, 25 avril 2020. Depuis le samedi 20 juin, l’application est devenue obligatoire pour les « migrant workers » qui doivent la conjuguer à une autre application, le SGWorkPass, sinon ils ne peuvent quitter leur dortoir et aller travailler.
[8] Sen A. (1982), « Rights and agency », Philosophy and Public Affairs, n° 11, p. 113-132.
[9] M. Gabanelli & S. Ravizza, « Coronavirus, perché tanti morti in Lombardia? Le 6 domande inevitabili », Corriere della Sera, 14 avril 2020. L’analyse actuelle des statistiques en France souligne également la différence de mortalité, en fonction des régions et des hôpitaux, des personnes au profil assez comparable – une différence qui ne peut s’expliquer que par le système de soins, les pratiques mises en œuvre et les traitements privilégiés, comme le soulignent D. Andolfatto et D. Labbé, dans la Revue politique et parlementaire du 20 mai 2020.
[10] Sur la grande et la petite éthique, cf. Hunyadi M. (2014). La tyrannie des modes de vie. Sur le paradoxe moral de notre temps. Lormont : Le Bord de l’eau.
[11] Communiqué de la présidence de la République du 24 mars 2020, disponible ici.
[12] Un tel appel s’est fait entendre très récemment. En effet, le 7 mai 2020, des entreprises privées telles que la société Palantir, qui a été mêlée étroitement au scandale Cambridge Analytica, vient de signer un accord avec le National Health Service (NHS) britannique afin d’accéder aux données confidentielles des patients, telles que les résultats des tests et les appels NHS 111. Même si cet accès est censé être limité à la crise du coronavirus, nombre de spécialistes s’inquiètent de cette « politique du pied dans la porte ».
[13] Un des exemples de l’effet cliquet est le remplacement irréversible des clés, aussi bien dans les hôtels que dans les universités, par une carte à puce alors même qu’elle représente un outil potentiellement intrusif. B. Dupont, « Covid-19 : les dérives possibles de surveillance des données personnelles », The Conversation, 29 mai 2020.
[14] Ils étaient 806’ 570 le dimanche 28 juin 2020
[15] S. Shah, « Contre les pandémies, l’écologie », Le Monde diplomatique, mars 2020, p. 21.